Rubriques
Einstein
Type de publication:
BookAuteurs:
Elisha, RonSource:
Éditions Lansman, Bruxelles, p.56 (1995)Texte complet:
Dans ce récit, la figure d’Einstein est scindé en trois personnages, et là se situe son originalité. Inspiré par les différents écrits d’Albert Einstein, Elisha, fortement marqué par les approches psychanalytiques, propose en premier lieu un Einstein à la veille de sa mort, nommé le Professeur, rongé par les remords et la culpabilité de ses mariages, de sa relation avec ses enfants, de son exil en Amérique, mais surtout de son influence théorique et politique sur les recherches ayant mené à la création de la bombe atomique. Le rapport entre les découvertes de l’homme et de la bombe est central dans la pièce. Le deuxième personnage, appelé Einstein, est au milieu de sa vie et obsédé par la recherche d’une théorie unifiée. Le troisième protagoniste, prénommé Albert, est un jeune Einstein enthousiaste, presque ingénu, qui vient de réaliser sa première théorie de relativité restreinte.
Les trois Einstein dialoguent tout au long de la pièce. Le personnage du Professeur est présenté comme la voix à la fois sage et amère de la conscience des jeunes Einstein. Elisha s’inspire du fait que le scientifique a affirmé qu’il aurait voulu rencontrer Moïse pour lui demander s’il avait imaginé que son peuple obéirait pendant si longtemps à ses lois; à plusieurs reprises, le Professeur s’adresse à Moïse en pleurs. À la fin, on sent que sa mort est imminente. Le spectateur doit d’abord entendre des sanglots; Elisha fait d’Einstein une figure tragique.
Un travail de documentation sur la vie du savant est manifeste et utilisé tout au long de la pièce, comme en témoignent les thèmes abordés lors de leurs discussions : réflexions sur l’Allemagne, sa politique et sa culture, sur la science « pure », son pacifisme, ses travaux avec Freud, ses moindres faits et gestes, ses mariages, son rapport au monde. En scindant ainsi Einstein, l’auteur met en scène les contradictions et les obsessions du physicien, qui dialogue sourdement avec lui-même. Le portrait dressé par Elisha est sombre et tourmenté, mais nous offre une vision personnelle, bien que parfois fort subjective, d’Albert Einstein.