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Le journal d'Harvey
Type de publication:
BookAuteurs:
Hamburger, JeanSource:
Flammarion, Paris, p.440 (1983)Texte complet:
De l’aveu même de l’auteur, ce roman se veut un « journal imaginaire » qui retrace une courte période de la vie de William Harvey (1578-1657), médecin anglais qui découvrit la circulation sanguine et le rôle moteur du cœur. Si les entrées du journal s’étalent de 1647 à 1654, l’essentiel du roman se consacre aux années 1647-1648. En dépeignant la vie d’un savant consciencieux et avide de connaissances, Hamburger profite de son rôle de diariste pour nous présenter la Padoue de 1600 telle qu’elle apparaît dans le souvenir de Harvey. Nous nous retrouvons dans une Italie en pleine effervescence intellectuelle : tandis que le spectre de Bruno hante encore les salles de cours, Galilée y va de diatribes envers les systèmes d’Aristote et de Ptolémée. Le récit de Harvey nous permet aussi de côtoyer Hobbes, Shakespeare, Descartes, Bacon. Partageant ses réflexions scientifiques au sujet de la procréation ou du fonctionnement du corps humain, Harvey s’inscrit en continuité avec ses scientifiques de la Renaissance qui bouleversèrent à la fois les paradigmes antiques et les dogmes de l’Église : « ma vie fut un combat contre un traditionalisme fanatique » (p.32).
Figure centrale à partir de laquelle tout l’horizon scientifique du XVIIe siècle se ramifie, Harvey profite de son journal pour exposer le cas de certains patients et pour répondre à ses détracteurs. Le roman d’Hamburger a le mérite d’exposer la méthode scientifique de l’époque, avec ses intuitions et ses tâtonnements. Une bonne part du récit porte aussi sur un contexte politique houleux. Harvey, qui a prêté allégeance à Charles Ier, voit s’effondrer la monarchie qui forment les assises de la société anglaise. Sans jamais tomber dans le didactisme ou la nostalgie, le roman de Jean Hamburger est efficace. Du rejet des idées de Harvey à leur reconnaissance (on lui érigera une statue à la fin de sa vie), ce récit permet de suivre l’évolution d’une pensée qui, contrairement à bien d’autres, parvient à s’imposer du vivant du scientifique.