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The Biographer's Tale
Type de publication:
BookAuteurs:
Byatt, A. S.Source:
Chatto & Windus, Londres, p.260 (2000)Mots-clés:
Carl Linn, Charles Darwin, é, Francis Galton, Henrik IbsenTexte complet:
Ce roman de Byatt est construit comme une succession presque infinie de mises en abyme. Le premier narrateur est Phineas G. Nanson, un étudiant universitaire en études littéraires poststructuralistes, qui décide un jour que ses études manquent de faits tangibles et décident de se lancer plutôt dans la rédaction d’une biographie sur Scholes Destry-Scholes, le biographe fictif du nom moins fictif Sir Elmer Bole, un voyageur qui aurait écrit un livre intitulé Journey Through Seven Climates. L’histoire se complique lorsque Nanson découvre que Destry-scholes préparait trois autres biographies à propos du taxinomiste, Carl Linné, du statisticien, Francis Galton et du dramaturge, Henrik Ibsen. Outre les manuscrits incomplets découverts par Nanson, où l’identité des trois hommes célèbres n’était indiquée que par leurs initiales, il découvre également des fiches de travail remplies de citations sans références et sans titres. Il apparaît que Destry-Scholes s’intéressait davantage à ce qui liait les trois personnages qu’à leur vie réelle, allant jusqu’à inventer de nombreux faits. Au fur et à mesure que le jeune étudiant tente de rédiger sa biographie de Destry-Scholes, il se rend compte de l’impossibilité de l’entreprise biographique (en général) et transforme son projet en autobiographie.
Avec son personnage principal qui abandonne la théorie postmoderniste en plein séminaire sur Lacan, qui travaille ensuite dans une agence de voyages fondée sur les principes de Fourrier et qui passe sa vie à débusquer les très nombreuses sources à l’origine d’une biographie obscure que personne n’a lue, The Biographer’s Tale est sans doute un peu trop cérébrale et s’adresse surtout à des littéraires universitaires. Toutefois, il s’agit d’un roman complexe, sans être compliqué, qui est intéressant surtout par sa forme, qui se dévoile au fil des multiples relais narratifs et de leurs récits enchâssés. Tout au long du récit-cadre, de longs extraits des textes découverts par Nanson sont insérés, alternant entre les textes sur Linné, Galton et Ibsen. Il apparaît alors que le travail de Destry-Scholes, et le roman de Byatt par extension, s’apparenterait davantage au principe de la « photographie composite » que de la biographie. Cette technique socioartistique pratiquée par Francis Galton est expliquée dans le roman : il s’agit de la superposition de photographies de visages semblables (même famille, même peuple, etc.) pour donner une photographie résultante différente qui serait la moyenne ou l’amalgame des originaux. Cette technique appliquée à la narration littéraire est particulièrement évidente lorsque Nanson copie les fiches de Destry-Scholes, sans titres et sans explications, mélangeant indifféremment les trois sujets de ses études. Ainsi, les caractéristiques attribuées à l’un ou à l’autre se confondent et créent un portrait amalgamé.
La présence des deux scientifiques, Carl Linné et Francis Galton, est assez importante dans le roman de Byatt. Outre les deux passages d’une vingtaine de pages chacun sur les détails biographiques, réels et fictifs, de leur vie, les deux figures de savant font également l’objet de recherches plus approfondies par Nanson, celui-ci n’ayant aucune autre trace pour mieux connaître Destry-Scholes. Ainsi, si le principe de photographie composite s’applique à tout le roman, les principes taxinomiques de Linné n’en sont pas moins importants pour le narrateur qui est fasciné par la méthodologie de Linné, obsédé par la sexualité des vivants et par les sensations visuelles et olfactives qu’elle provoque chez l’homme.